À la demande de la Municipalité, la photographe Patricia Baud et l'écrivain Alain Bellet se sont engagés à réaliser un travail artistique avec les jeunes de Rouvroy (Pas-de-Calais) concernant leurs préoccupations quotidiennes et leurs regards sur la ville et le passé collectif de cette cité minière.
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Exit les casques des mines ou la casquette trop mollassonne des ritals et des polaks d'hier. C'est l'heure américaine d'une bâche de toile qu'on tourne de gauche à droite, une visière-girouette qui aiderait, dit-on, à percevoir le sens du vent. L'identitaire s'offre une planète et les jeunes d'ici s'habillent à la vitrine du monde, chez Cow-boy et Cie, juste par inadvertance ou belle innocence. Pour dissiper les craintes, deux solutions, la béatitude d'une rêvasserie que l'on s'offre dans un bureau de passage ou le travail, l'écriture aussi. Les regards pèsent les mots, la relecture vaut engagement. La vie semble arrêtée à l'aune d'une pensée revendicative. Charles, Ali, Angelo et les autres découvrent alors l'implication de la chose écrite, prolongement dynamique de la pensée. A leurs côtés, une fille observe. En ville, les autres se figent. Les jeux s'arrêtent, les regards sont levés. Quel message inconnu d'une filiation, la pelote des mémoires d'une terre bousculée, même si le calme ambiant invite à une douce quiétude. Dans la fraternité des moments partagés, les regards d'une jeunesse qui se cherche une route restent graves. Les images et les mots ne voudraient pas les figer.C'est le grand bal des espérances et dans les mêlées de vie à venir, le grand terril qui les protège sait encore les rassembler pour immortaliser l'histoire qui les a fait être. Dans leurs jeux innocents, leur ville devient un monde forgé à leurs mesures, un espace d'équilibre, à l'abri des turpitudes urbaines.Et la grande colline façonnée à la main n'en finit pas de les accueillir pour une gigue du souvenir. C'est l'heure des crépuscules où l'herbe et le charbon brouille le décryptage des regards.
C'est la vie qui avance sur un chemin de lune. La vie qui descend, monte, revient et gambade dans le soir des anciens et le demain des plus jeunes. Regardez-les, à la frontière des rêves, la colline noire reste une planète à découvrir... Elle épouse leurs pas, donne écho à leurs mots, engrange des sentis pour surligner à jamais leur vie.Rouvroy est un passé où l'herbe repousse, c'est un présent où le temps se fait minerai, c'est un futur enfin, où des rires naît la gravité, de l'inquiétude, une belle insouciance. Contrastes donc, laissez-vous habiter par ceux qui arrivent, un beau matin d'été...
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